Contrecollage
Fabrication de cartes à l'ancienne

Durant quatre cents ans (du milieu du xve siècle à celui du xıxe), le procédé de fabrication des cartes à jouer n'a guère changé. On contrecollait trois papiers les uns aux autres : le papier au pot (sur lequel étaient imprimées les images), la main brune (ou étresse, qui renforçait les cartes et leur donnait de l'opacité) et le papier cartier (venant au dos des cartes). On obtenait ainsi une carte à la fois fine et suffisamment rigide pour offrir une bonne tenue en main.






       


Les cartes produites pour les tarots restitués et les facsimilés sont réalisées suivant la même méthode, à partir de matériaux choisis avec un soin particulier. La main brune (carton léger de 100 g/m² jouant le rôle de l'âme de la carte), est pris en sandwich par contrecollage. D'un côté vient le papier au pot (pour la face des cartes) et de l'autre, le papier cartier (dos des cartes) d'environ 80 g/m² chacun. La colle, fabriquée selon une recette maison, est enduite au pinceau dans un geste rapide car celle-ci, appliquée en une fine couche, sèche rapidement. L'assemblage des trois feuilles élève l'ensemble à une densité d'environ 260 g/m². Pour la fabrication de cartes plus grandes, comme celle du tarot d'Oswald Wirth, et afin d'obtenir une rigidité adapté à ce format, la main brune est remplacée par un carton plus fort, élevant la carte finale à une densité  450 g/m2.



Paul Marteau et Nicolas Conver
Préparation de la colle.


Paul Marteau et Nicolas Conver
Encollage d'une planche au pinceau.


Les planches sont ensuite mises sous presse durant plusieurs jours, durée variant selon l'humidité ambiante. Cette phase de séchage tend fortement la surface de la face qui courbe la feuille. Ce phénomène est équilibré grâce au dos qui subit le même effet et joue un rôle compensatoire. La carte qui en résulte est rigide et produit un son chaud et sec lorsqu'on la fait vibrer, offrant une nervosité idéale. Les planches sont ensuite coupées au format des cartes qui, comme les anciens jeux, présentent de subtiles irrégularités : images à peine décentrées et subtiles variations de taille.

À ces particularités de l'artisanat viennent se joindre les effets de bombage ou de gondolement, qui même s'ils sont moins marqués que dans la plupart des jeux anciens (voir ci-contre) se produisent également. Pour entretenir son tarot, on peut atténuer ces effets en le plaçant de temps à autres, entre deux plans bien serrés, comme le faisaient les gérants de bistrot d'antan avec leur presse à jeu de cartes spécialisement dédiées à cet usage.

La finition des cartes consiste au lissage manuel des quatre côtés, afin qu'elles glissent parfaitement en main lors de leur utilisation et si besoin, à l'arrondissage des coins. Arrivé à ce stade, le tarot est prêt pour sa mise en boite (facsimilé et restitutions) ou pour sa mise en couleur au pinceau (cartes à offrir).


Tarot de Nicolas Conver courbure et gondolement
Un jeu de 22 arcanes artisanaux. Les cartes gondolent à peine et peuvent présenter de légères variations de bombage.
 

Tarot de Nicolas Conver courbure et gondolement
Un tarot de Nicolas Conver de la fin du xıxe siècle : les cartes sont bombées et ne gondolent pas toutes de la même manière.