La kabbale appliquée au tarot
À la fin du xvıııe
siècle, l’occultisme tarotique
apparaît, sous la plume d’Antoine Court de Gébelin dans le Monde
primitif. Outre l'interprétation des vingt-deux
atouts, il
est le
premier à suggérer un rapport entre ces derniers et les caractères de
l’alphabet hebreu. Au milieu du xıxe
siècle, Éliphas Lévi
développe l’association des vingt-deux images du tarot avec les
caractères de l’alphabet hébreu. Ces idées sommeillent jusqu’à la fin
du siècle, lorsque Papus s’approprie les idées d’Éliphas Lévi et que
Oswald Wirth dessine son propre tarot. C'est à partir de mon édition
originale de l'ouvrage d'Oswald Wirth (bel ouvrage relié à dos cuir),
que j'ai puisé pour exposer ici
les rudiments du tarot kabbalistique.
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Note
: en raison sa longueur, cet article a été scindé en quatre parties. Pour
visualiser l'article en sections, cliquez
ici. |
40 ans de recherches
Après la parution de son premier tarot en 1889, Oswald
Wirth n’aura de
cesse de travailler à l’écriture d’un ouvrage qui en explore les
multiples facettes. Il lui
faudra près de quarante ans pour mener ce labeur à terme : en 1927 Le
tarot des Imagiers du Moyen-âge est publié et offre une vaste étude du
sujet, abordant ses principaux aspects : historique, symbolique,
alchimique, franc- maçonnique, astrologique et bien entendu,
kabbalistique.
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Première édition de 1927
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Les trois septenaires
Une des originalités des théories tarologiques
d'Oswald Wirth est
qu'elles proposent, en plus de l'analyse symbolique de chaque
arcane, une structuration de la
totalité des vingt-deux arcanes ensembles (Papus avait précédemment
dessiné des cercles divisés en douze rayons, dans lesquels il faisait
tenir les arcanes majeurs et mineurs). Il semble en cela être le
premier à avoir émis cette possibilité et présente les arcanes en un
unique cercle (1 x
22) ou en deux lignes (2 × 11). Dans le troisième chapitre de la
première partie de l'ouvrage, Le
tarot kabbalistique,
il propose d'écarter le fou pour permettre deux autre modèles basé sur
vingt-et-un arcanes, l'un de sept ternaires (7 × 3) et l'autre, de trois
septenaires (3 × 7). Le
Fou, semble alors à lui seul faire contre-poids aux 21 arcanes du groupe.
Le ternaire, pouvant être assimilé à la trinité chrétienne, résume 1)
le principe agissant, le sujet
; 2) l'action de ce sujet, le verbe
; et 3) l'objet
de cette action. Ces trois concepts, font analogie avec le créateur
(actif), le fait de créer (intermédiaire) et la créature (passive) ; ou
encore l'esprit, l'âme et le corps.
Note : Concernant la structure des 22 arcanes, le livret qui accompagne l'édition artisanale du tarot d'Oswald Wirth propose une théorie plus abordable et en meilleure accord avec la kabbale, puisqu'elle se calque deux fois sur les dix séphiroth (2 × 10) mettant de côté le Fou et le Monde. |
Dès la deuxième partie de
l'ouvrage (p. 36), Oswald Wirth expose « la roue » des
vingt-deux arcanes
Première page de la section
kabbalistique associée au tarot
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Les dix séphiroth
Le chapitre aborde ensuite le second aspect de la
kabbale, sous la forme de l'arbre de vie qui dévoile l'origine de
l'univers et ses mystères par les séphiroth (pluriel de séphirah, les
nombres). L'unité, cause et point de départ de toutes choses,
a reçu le nom de Kether, qui signifie Couronne. C’est, comme le
Bateleur (1), la source de toute activité. La deuxième séphirah est
appelé C’hocmah, Sagesse, et correspond à la Papesse (2). La troisième
Séphire, Binah, Intelligence, Compréhension, l’Impératrice (3), à la
conception et des idées. Quatrième Séphire, C’hesed,
Miséricorde, l’Empereur (4). Cinquième Séphire :
Geburah, Force, le Pape (5). Sixième Séphire :
Tiphereth, Beauté, l’Amoureux (6). Septième Sephire :
Netsah, Victoire, le Chariot (7). Huitième Sephire :
Hod, Gloire, la Justice (8). Neuvième Sephire :
Jesod, Fondation, l’Ermite. Dixième Séphire : Malcut,
Royaume, qui synthétise l’être complet en puissance de devenir. Cet
être est appelé Homme céleste ou Adam Kadmon. Il ne possède aucune
existence matérielle, mais il réunit les principes créateurs divins qui
entrent en jeu pour donner naissance à l’homme. Celui-ci ne prends
corps sur le plan physique qu’en subissant la différentiation
individuelle, dont le tourbillon évolutif est figuré par la Roue de
Fortune (10). La kabbale nous enseigne également que les dix séphiroth
peuvent ensuite être reliés entre eux par vingt-deux chemins, chacun
associé à une lettre de l'alphabet, les cinéroth, consituant un
troisième degré de compréhension des nombres et des lettres : leur
relation ensemble.
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Les dix séphiroth disposés en
relation avec le corps de l'Adam Kadmon, symbole kabbalistique de
l'homme
céleste.
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Les 22 caractères hébreux
Tel que suggéré par Court de Gébelin, puis développé
par Éliphas Lévi au milieu du xıxe
siècle, Oswald Wirth précise le rapport entre les arcanes du tarot et
les vingt-deux caractères de
l’alphabet hebreu : « Le nombre 22 rattache incontestablement les
arcanes du tarot aux lettres de l'alphabet sémitique, car ce nombre ne
correspond à aucune autre série. Est-ce une raison pour considférer les
figures du tarot comme inspirées par la forme des lettresde l'laphabet
sacré des kabbalistes ? De quelques rencontres, on ne saurait conclure
à une intention appliquée systématiquement. » (Le
tarot des imagiers du Moyen
Âge, 1927, page 91). Sur cette base, Oswald wirth
développe un tableau de correspondances (ci-contre) présentant de
gauche à droite le numéro de l'arcane, le dessin du caractère hébreu, s
prononciation, sa traduction en français et le phonème correspondant.
Ces mises en rellation permettent d'augmenter les interprétations de
chaque arcane, en développant par exemple, la symbolique du bœuf
associé au Bateleur (1) : le travail, la production, la force, etc. il
en va de même pour chaque caracère suivant : Beth (maison), Gimel
(chameau), Daleth (porte), Hé (fenêtre), Vau (crochet), Zaïn (Arme),
Heth (Haie), Teth (Boue), Jod (Main), Caph (paume), Lamed (aiguillon),
Mem (eau), Nun (poisson), Samek (poteau), Ayn (œil), Phé (bouche),
Tsadé (javeline), Quof (singe), Resch (tête), Schin (dent) et Tau
(croix).
Nous attirons toutefois l'attention sur le fait que les traductions sont anciennes et qu'il est préférable de se référer un à dictionnaire récent ou au livret d'accompagnement de l'édition artisanale du tarot d'Oswald Wirth. |
Le tarot et l'alphabet hébraique
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Comprendre la kabbale
Ces deux aspects de la kabbale, analogies des lettres
et des nombres avec l'univers et la nature même de Dieu, sont d'abord
compris par l'étudiant comme une mise en relation superficielle. Les
séphiroth et les cinéroth attendent, pour être profondément compris, un
effort de la part de ce qu'Oswald Wirth nomme fréquemment dans ses
ouvrages, le récipiendaire ou l'initiable.
C'est à force de s'imprégner de ces symboles qu'ils prennent leur sens
profond et ouvrent leurs mystères à l'esprit. Les tarots et la kabbale
ne révèlent
leur secret qu'à ceux qui savent méditer.
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En guise d'encouragement à
l'étude du tarot, l'ouvrage présente en page de garde, une
dédicace En
très cordiale sympahie.
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